Reconstitution

La bataille du Saint-Laurent

En 1942, des sous-marins allemands ont arpenté les profondeurs du Saint-Laurent à la recherche de proies faciles. Au total, 16 navires sont coulés au Québec pendant la bataille du Saint-Laurent. Théâtre canadien de la Deuxième Guerre mondiale, cette guerre navale se déroule principalement à proximité de zones habitées. L’objectif principal des Allemands est alors de mettre un terme à l’approvisionnement destiné à la Grande-Bretagne et aux troupes alliées. Vingt-deux (22) navires ont été coulés au Canada, dont seize (16) au Québec pendant la bataille du Saint-Laurent (1942-1944). D’autres furent endommagés, mais demeurèrent à flot.

De 1942 à 1944, une quinzaine de sous-marins allemands pénètrent dans les eaux canadiennes. Huit d’entre eux coulent et endommagent des navires marchands et des bateaux de la Marine royale canadienne.

Pour les commandants des sous-marins, malgré les succès remportés, c’est une campagne difficile. Les forces canadiennes, et particulièrement l’aviation, attaquent souvent et avec précision. Les ripostes lancées ont endommagé plusieurs sous-marins au point où leurs commandants ont souvent dû retraiter et plonger en catastrophe. Quelques sous-marins furent touchés, mais aucun n’a été coulé. 1

Afin d’introduire le sujet de la navigation en convois et pour décrire le début des hostilités, n ous avons choisi des extraits de certains articles et du livre Rien de plus noble (2002).

À partir du mois de mai 1942, on instaure le système des convois dans les eaux canadiennes. Durant la bataille du Saint-Laurent, les navires de guerre canadiens sont mandatés pour escorter les navires marchands. Sur le Saint-Laurent, ces navires quittent le port de Québec et descendent le fleuve sans escorte jusqu’au large des îles du Bic, près de Rimouski.2

Au large des îles du Bic, tous les navires marchands ont alors l’obligation de se placer en formation de convoi. Les navires transportant les cargaisons susceptibles d’être les principales cibles des torpilles allemandes, comme les pétroliers, sont placés au cœur du convoi pour leur assurer une meilleure protection. La navigation en convoi escorté de navires de guerre est obligatoire et la seule raison pour quitter les rangs est d’être attaqué par un sous-marin. Ces convois naviguent vers l’est en décrivant de longs zigzags sur l’eau. Ces zigzags pourront peut-être déjouer les torpilles allemandes, mais ont comme inconvénient d’allonger le trajet et de faire dépenser plus de mazout.3

Les convois évoluent en fonction de la vitesse du navire le plus lent du groupe. Après une escale à Rimouski, les navires convoyés ralentissent leur allure et font débarquer leur pilote à la station de pilotage de Pointe-au-Père. De là, en petits convois escortés par quelques navires de guerre, ils entreprennent le périlleux voyage qui les fera passer devant Gaspé puis l’île du Cap-Breton, avant de gagner l’Atlantique. 4

Ces convois, formés de navires marchands réquisitionnés, traversent l’Atlantique pour ravitailler la Grande-Bretagne en vivres, munitions, armes et pétrole, bien sûr, mais ils sont aussi essentiels le long des côtes nord-américaines et sur le fleuve. Le long des côtes et sur l’océan, il faut s’assurer que le réseau d’approvisionnement soit le plus efficace et le plus sécuritaire possible. 5 D’autres convois transportent des matériaux de construction pour la base aérienne de Goose Bay et ravitaillent la base aérienne américaine en construction dans l’Arctique. 6

En mer, le convoi se dispose suivant un grand rectangle comportant de courtes colonnes éloignées les unes des autres d’environ 1 km, et où chaque navire maintient une distance allant de 350 à 550 mètres entre son arrière et l’avant de celui qui le précède. Mais le groupe compte également un commodore, qui hisse sa marque à bord du navire de commerce placé en tête de la file centrale, et à qui revient la tâche de superviser la discipline intérieure du convoi. 7

Convoi sur le Saint-Laurent, en 1942

Source : Collection d’Ian Tate

Habituellement, le commandant de l’escorte se place en avant, alors que le commodore de convoi est dans une des colonnes centrales de la première ligne. 8 Chaque convoi a son propre code. Les lettres utilisées font référence à la provenance et la destination du convoi. Ainsi, le convoi QS 12 quittant Québec vers Sydney (Nouvelle-Écosse) est le 12e convoi à effectuer ce trajet. 9

Voici les lettres utilisées pour les convois qui ont navigué sur le Saint-Laurent pendant la bataille du Saint-Laurent :

LN : Convois du Saint-Laurent au Labrador

NL : Convois du Labrador au Saint-Laurent

QS : Convois de Québec à Sydney

SQ : Convois de Sydney à Québec

Dès le mois de juillet 1942, les convois sont durement touchés par les attaques allemandes. Après les convois QS 15 et QS 19, les pertes liées au convoi QS 33 représentent près du quart des navires perdus pendant la bataille du Saint-Laurent. Les 6 et 7 septembre, les sous-marins U-165 et U-517 coulent 5 navires.

Devant les pertes de plus en plus grandes en vies humaines et en navires marchands, le gouvernement du Canada ferme le fleuve Saint-Laurent à tous les bâtiments transatlantiques, le 9 septembre 1942, et limite à l’essentiel les convois côtiers. Il n’en laisse pas moins beaucoup de travail aux défenseurs, 40 % des transports qui empruntent le couloir Sydney–Québec soutiennent un commerce côtier vital. La décision fort controversée prise par la Marine d’affecter 17 des rares corvettes à l’invasion imminente en Afrique du Nord (Opération Torch) ne fait que rendre leur tâche plus difficile encore. 10

Malgré la fermeture du fleuve et du golfe à la navigation transatlantique, la corvette HMCS Charlottetown est envoyée par le fond par le sous-marin U-517 le 11 septembre 1942. Quatre navires marchands seront coulés au Québec par la suite.

[…] le renforcement des défenses canadiennes à l’automne 1942, en particulier les patrouilles aériennes offensives, avait rendu impossible la conduite d’opérations de chasse par des sous-marins conventionnels. Voilà pourquoi les Allemands « évacuèrent » le Saint-Laurent à la fin de la saison 1942. 11 La menace n’était pas entièrement disparue. Les sous-marins coulèrent deux vaisseaux de guerre canadiens en 1944.12

Pour en savoir plus sur la navigation en convois :

KIROUAC, André, « 1942 : Alerte dans le Saint-Laurent », Cap-aux-Diamants, no 74, 2003, p. 44-47.

Texte intégral PDF : http://www.erudit.org/culture/cd1035538/cd1046221/7364ac.pdf

KIROUAC, André, « Un hommage aux marins d’origine hellénique décédés au cours de la bataille du Saint-Laurent », Magazine Gaspésie, vol. 40, no 2, hiver 2004, p. 2-3.

Organisation d’un convoi, http://www.les-annees-noires.fr/mer/convois-organisation.html

La bataille de l’Atlantique : Matériel pour les éducateurs, http://www.quai21.ca/sites/default/files/uploads/education/FR_battleatlantic.pdf , p. 8-20.

Le début des hostilités

[…] c’est le renforcement du système de la défense des Alliées dans l’Atlantique Ouest, entre février et mai 1942, qui persuada [le grand-amiral Karl] Dönitz d’engager ses sous-marins dans des secteurs moins protégés.13

La campagne des U-Boote dans le golfe du Saint-Laurent commença par hasard, mais elle allait revêtir une grande importance, d’abord pour le Canada et, ultimement, pour toutes les opérations allemandes. […] le sous-marin U-553 avait été endommagé par des escorteurs au sud de Terre-Neuve en mai 1942. Des avaries mécaniques encore plus graves venant s’ajouter à ces dégâts, le commandant [Karl] Thurmann estima qu’il ne pouvait entreprendre de réparations tout en continuant sa mission dans les eaux fortement défendues autour d’Halifax. En conséquence, il décida judicieusement de se rendre dans les eaux plus tranquilles du golfe du Saint-Laurent qui venait d’être libéré des glaces hivernales. Cela lui permettait du même coup d’embusquer les navires qui reprenaient leurs activités dans les eaux côtières. Peu après minuit, le 12 mai, Thurmann arriva au large de la côte nord de la péninsule de Gaspé et coula rapidement deux navires, le Nicoya et le Leto. Ces deux bâtiments avaient quitté Montréal le 10 mai et faisaient route l’un vers Halifax et l’autre vers Sydney pour rallier les convois transatlantiques. 14

Pour en savoir plus au sujet de la bataille du Saint-Laurent :

« La bataille du Saint-Laurent », dans DOUGLAS, W. A. B., et al., Rien de plus noble: histoire officielle de la Marine royale du Canada pendant la Deuxième guerre mondiale, 1939-1943, volume 2, partie 1, St. Catharines, Vanwell Pub., 2002, p. 473-528.

GREENFIELD, Nathan M., « La bataille que le Canada a choisi d’oublier », Magazine Gaspésie, vol. 40, no 1, été 2003, p. 29-30.

GREENFIELD, Nathan M., The Battle of the St. Lawrence, Scarborough, Harper Collins Publishers, 2004, 286 p.

HADLEY, Michael L., U-boats Against Canada: German Submarines in Canadian Waters, Kingston, Ont.: McGill-Queen’s University Press, c1985, 416 p.

HADLEY, Michael L., « La bataille du Saint-Laurent », Magazine Gaspésie, vol. 40, no 1, été 2003, p. 15-19.

SARTY, Roger, « Une défaite presque totale pour le Canada ? », Magazine Gaspésie, vol. 40, no 1, été 2003, p. 31-35.

SARTY, Roger , War in the St. Lawrence: the Forgotten U-Boat Battles on Canada’s Shores , Toronto, Allen Lane, 2012, 355 p.

TRÉPANIER, Louis, « 1942 : la Bataille du Saint-Laurent », Revue d’histoire du Bas Saint-Laurent, vol. 9, no 3, octobre-décembre 1983, p. 85-96.

Bataille du Saint-Laurent, https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_du_Saint-Laurent

La bataille du golfe du Saint-Laurent, http://www.veterans.gc.ca/fra/remembrance/history/second-world-war/battle-gulf-st-lawrence

L’été 1943 : un épisode de la bataille du SaintLaurent. Surveillance, défense et propagande, http://www.journal.forces.gc.ca/vo7/no1/history-histoire-01-fra.asp

Bataille du Saint-Laurent, http://www.encyclopediecanadienne.ca/fr/article/bataille-du-saint-laurent/

Opérations des sous-marins allemands, http://www.encyclopediecanadienne.ca/fr/article/sous-marins-allemands-operations-des/

Photos de la bataille du Saint-Laurent, https://www.flickr.com/photos/museenavaldequebec/sets/72157623500309831/?page=4

Vous êtes maintenant prêts à vivre la bataille du Saint-Laurent à l’échelle québécoise grâce aux déplacements des convois alliés et des sous-marins allemands. Cette reconstitution animée lève le voile sur un épisode méconnu de la Deuxième Guerre mondiale.

 

1 Capsules historiques, la Bataille du Saint-Laurent, « Les U-Boot en eaux canadiennes », Musée naval de Québec, 2003.

2 André Kirouac, « Un hommage aux marins d’origine hellénique décédés au cours de la bataille du Saint-Laurent », Magazine Gaspésie, vol. 40, no 2, hiver 2004, p.2.

3 André Kirouac, « 1942 : Alerte dans le Saint-Laurent! », Cap-aux-Diamants, la revue d’histoire du Québec, no 74, 2003, p. 45.

4 André Kirouac, « Un hommage aux marins d’origine hellénique décédés au cours de la bataille du Saint-Laurent », Magazine Gaspésie, vol. 40, no 2, hiver 2004, p.2.

5 André Kirouac, « 1942 : Alerte dans le Saint-Laurent! », Cap-aux-Diamants, la revue d’histoire du Québec, no 74, 2003, p. 47.

6 W. A. B. Douglas et al.,Rien de plus noble: histoire officielle de la Marine royale du Canada pendant la Deuxième Guerre mondiale, 1939-1943, volume 2, partie 1, St. Catharines, Vanwell Pub., 2002, p. 490.

7 Organisation d’un convoi,http://www.les-annees-noires.fr/mer/convois-organisation.html , dernière consultation le 22 novembre 2015.

8 La bataille du L’Atlantique : Matériel pour les éducateurs, http://www.quai21.ca/sites/default/files/uploads/education/FR_battleatlantic.pdf , dernière consultation le 23 novembre 2015.

9 Convoi de navires, https://www.flickr.com/photos/museenavaldequebec/4435415874, dernière consultation le 26 novembre 2015.

10 La fermeture du golfe du Saint-Laurent, http://www.veterans.gc.ca/fra/remembrance/history/second-world-war/battle-gulf-st-lawrence/closegulf , dernière consultation le 26 novembre 2015.

11 W. A. B. Douglas et al.,Rien de plus noble: histoire officielle de la Marine royale du Canada pendant la Deuxième Guerre mondiale, 1939-1943, volume 2, partie 1, St. Catharines, Vanwell Pub., 2002, p. 528.

12 La bataille du L’Atlantique : Matériel pour les éducateurs, http://www.quai21.ca/sites/default/files/uploads/education/FR_battleatlantic.pdf , dernière consultation le 30 novembre 2015.

13 W. A. B. Douglas et al., op. cit., p. 473.

14 Ibid. , p. 474.